Une marque de l’Union européenne (UE) peut être annulée si elle n’est pas suffisamment exploitée. Comment pouvez-vous l’éviter ?

Une marque de l’UE (anciennement « marque communautaire ») est un titre unitaire qui produit ses effets dans les 28 Etats membres de l’Union Européenne (le Royaume-Uni n’ayant pas encore modifié sa législation suite au Brexit).

Une marque de l’Union européenne doit faire l’objet d’un usage sérieux dans les cinq ans qui suivent son enregistrement.

A défaut, elle risque d’être déchue pour non-usage, c’est-à-dire annulée à la demande d’un tiers ayant un intérêt à cet effet.

La question qui se pose alors est de savoir dans quel(s) Etat(s) membre(s) la marque doit être exploitée pendant ces cinq ans pour échapper à la déchéance, la législation européenne n’apportant aucune réponse en la matière.

Les trois considérations ci-dessous vous aideront à comprendre ce que vous pouvez faire pour éviter la déchéance de vos marques de l’UE.

1) Exploitez vos marques sur un maximum de territoires au sein de l’Union Européenne

Depuis l’arrêt ONEL du 19 décembre 2012, la Cour de Justice de l’Union européenne considère que l’appréciation de l’usage sérieux dans l’Union européenne doit « faire abstraction des frontières du territoire des Etats membres ».

L’usage d’une marque dans un seul Etat membre ne permet donc plus automatiquement de valider un usage sérieux dans l’ensemble de l’UE, comme c’était le cas auparavant.

Pour se protéger d’une annulation de vos marques, mieux vaut donc les exploiter sur un maximum de territoires au sein de l’UE.

N’oubliez pas que cet usage peut être effectué directement par votre société ou par un tiers que vous avez dûment autorisé (revendeur, distributeur, …).

2) Interrogez-vous sur la nature de votre marché et les circonstances de votre exploitation

Mais que les titulaires de marques de l’UE se rassurent ! Dans certains cas, une exploitation dans un seul Etat membre peut suffire.

En effet, et c’est également l’apport de l’arrêt ONEL, les caractéristiques du marché en cause, la nature des produits ou des services couverts par la marque, les capacités de production ou de commercialisation de l’entreprise, son degré de diversification, la fréquence et la régularité de l’usage peuvent justifier que la marque ne soit exploitée que dans un seul Etat membre.

Il en ira ainsi, par exemple, s’il s’agit d’un marché de niche ou, à l’inverse, d’un marché fortement concurrentiel difficile à pénétrer.

Par ailleurs, un faible volume de produits commercialisés sous une marque pourra, par exemple, être compensé par une forte intensité ou une grande constance dans le temps de l’usage de cette marque, et inversement.

C’est donc une appréciation globale, au cas par cas, qu’il convient d’effectuer, en tenant compte de l’interdépendance de tous les facteurs pertinents. 

Dans ce contexte, il est alors cohérent de ne pas limiter la protection des marques de l’UE aux seules exploitations commerciales quantitativement importantes.

C’est ce qu’est venu préciser le Tribunal de l’UE dans un arrêt du 18 octobre 2016 (August Storck KG c/ EUIPO).

Dans cette affaire, l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) avait prononcé la déchéance de la marque FRUITFULS d’une société allemande, protégée pour des sucreries, aux motifs que l’usage était très faible (sur un seul mois, volume des ventes presque insignifiant,  uniquement en Slovénie) comparé au volume des ventes sur le marché européen de ce type de produits.

Heureusement, le Tribunal de l’UE annule cette décision.

Si l’on doit certes faire abstraction des frontières du territoire des Etats membres pour apprécier l’usage, il est disproportionné d’exiger un usage d’une marque de l’Union européenne en moyenne 28 fois supérieur à l’usage d’une marque nationale pour être qualifié de sérieux.

Compte tenu de la taille du marché européen des sucreries, il est probable que même les produits les mieux implantés n’acquièrent pas des parts de marché supérieures à 5%.

L’on relèvera toutefois que le Tribunal qualifie le raisonnement adopté par l’EUIPO d’ « erreur de droit », de sorte que la déchéance aurait pu être confirmée si l’EUIPO avait employé une autre méthodologie (par exemple, en constatant que le faible volume de ventes n’était compensé par aucun autre facteur, tel une capacité de production limitée de la société allemande).

3) Collectez, de façon régulière, les preuves d’usage de vos marques

L’usage sérieux d’une marque de l’UE dépend donc de son étendue géographique mais aussi des spécificités du marché dans lequel il s’inscrit.

Dans tous les cas, il convient de documenter l’usage de la marque le plus régulièrement possible.

Cette démarche est indispensable pour vous permettre de défendre votre marque et éviter son annulation.

Faites le test de ces trois éléments sur vos marques de l’UE pour déterminer si elles sont à risque dès aujourd’hui !

Formations Alatis 2024
Nos meilleurs vœux pour 2024
Voeux 2023
Droit d’auteur et droit moral
Bientôt un iPhone dans sa chaussure ?
Les formations d'Alatis - novembre 2023
L’utilisation de son nom de famille en tant que marque
Alatis lance son programme de formations certifiées