La directive qui met les géants du net au tapis…
L’évolution des technologies numériques a transformé la façon dont les œuvres et d’autres objets protégés sont créés, produits, diffusés et exploités. Dans l’environnement numérique, les consommateurs se voient offrir de nouvelles possibilités d’accéder à des contenus protégés par le droit d’auteur. L’émergence des GAFA a mis le droit d’auteur face à de nouveaux défis. Par exemple, Google doit-il payer pour afficher des photos qui ne lui appartiennent pas ?
C’est dans ce contexte, que le Parlement européen a adopté une directive sur le droit d’auteur dans le marché unique. Cette directive vise à moderniser les droits d’auteurs face au développement du numérique, le dernier texte sur le sujet datant de 2001.
Deux points de cette directive semblent poser particulièrement problème.
L’utilisation des contenus par les plateformes internet
La Commission européenne souhaite accorder plus de poids aux titulaires de droits face aux plateformes qui stockent et proposent au public des œuvres ou autres objets proposés par le droit d’auteur. C’est le cas d’une plateforme comme YouTube, qui héberge de nombreux clips vidéo.
Pour cela, l’article 13 oblige les grands groupes numériques à mettre en œuvre des moyens pour s’assurer que les contenus protégés ne soient pas diffusés à l’encontre des droits d’auteurs. Ces plateformes auraient alors recours au filtrage automatisé. Le contenu partagé en ligne étant très important, ces moyens seront automatiques.
Certains craignent que les plateformes n’en viennent à supprimer certains contenus pour se protéger des infractions au droit d’auteur. Il est en effet très difficile pour une machine de distinguer la véritable contrefaçon de ce qui relève de l’exception au droit d’auteur (par exemple, un extrait audio venant illustrer une vidéo de critique musicale).
De plus, cette mesure renforcerait la centralisation d’internet. Les dispositifs technologiques à mettre en place peuvent se révéler très couteux. Les start-ups et PME voulant se lancer sur le marché seraient alors pénalisés.
La création d’un droit voisin pour les éditeurs de presse
Tout comme le droit d’auteur, le droit voisin apporte des protections. Mais, à la différence des droits d’auteur, le droit voisin s’applique aux personnes et entités qui participent à la création de l’œuvre. La création d’un droit voisin permet donc aux éditeurs de presse de détenir des droits sur les articles écrits par les journalistes. A l’heure où Google et Facebook sont devenus les principales sources d’information, pouvant référencer et diffuser des articles de presse sans rien verser en retour aux éditeurs ; ce droit donne la possibilité aux éditeurs de presse de se faire rémunérer plus facilement lors de la réutilisation de leurs articles sur des sites internet qui indexent les articles de façon automatique, comme Facebook ou Google News.
Toutefois, la création d’un droit voisin pourrait engendrer des mesures de représailles de la part des géants du net, comme ce fut le cas en Espagne.
En 2014, l’Espagne a voulu protéger les éditeurs de presse face à Google Actualités. Ce dernier en guise de représailles à déréférencer bon nombre d’articles de la presse espagnole, conduisant à une forte baisse de leur fréquentation.
Enfin, une telle mesure ne permet pas de couvrir l’étendue du problème. La majorité des utilisateurs utilisent des plateformes comme Facebook ou Twitter pour se tenir informés. Bien souvent, ils se contentent uniquement de lire le résumé des articles. De ce fait, la fréquentation des sites de presse baisse largement.
Depuis 2000, le marché publicitaire de la presse a chuté en France de 71 %. Dans le même temps, Google et Facebook captent 78 % des recettes publicitaires numériques, 90 % sur le mobile.
Ainsi, si la directive est votée, la presse européenne détiendra des armes juridiques pour obtenir des compensations financières suite à l’utilisation de leur contenu par les grandes plateformes internet.