Intelligence artificielle : les professionnels de la propriété intellectuelle s’organisent depuis longtemps

Intelligence artificielle : les professionnels de la propriété intellectuelle s’organisent depuis longtemps

Le développement de l’intelligence artificielle (IA)pousse les professions juridiques à intégrer ces nouveaux outils dans leur fonctionnement à tous les stades de la vie d’une marque. L’IA est à l’ordre du jour des groupes de travail de l’INTA depuis plusieurs années. Pour accompagner l’évolution des pratiques, les députés européens ont approuvé en mai 2023, de nouvelles règles de transparence et de gestion des risques pour les systèmes d’intelligence artificielle posant ainsi le cadre d’une mise en œuvre éthique en Europe. ALATIS est de longue date partie prenante des travaux en cours sur ces différents sujets et fait le point sur la question.

Propriété intellectuelle : des procédures plus rapides et moins coûteuses grâce à l’IA

Une utilisation disparate de l’IA selon les pays

C’est aux États-Unis que les professionnels de la propriété intellectuelle ont depuis une dizaine d’années déjà, développé un usage régulier de l’IA dans l’ensemble du process, de la recherche de disponibilité à la procédure de dépôt / d’examen de la marque.

Dans le cadre des litiges, l’IA a aussi pris une place prépondérante dans les procédures juridictionnelles, notamment pour passer en revue les millions de documents nécessaires à la phase de divulgation. On parle de e-discovery. D’autres opérations sont aussi réalisées telles que codage de documents, assistance aux recherches de documents légaux, analyses prédictives, création assistée de documents, automatisation et amélioration des procédures.

A l’exception de l’Australie dont le système légal est proche de celui des États-Unis, peu de pays ont adopté l’intelligence artificielle dans le cadre des procédures judiciaires.

Que ce soit aux États-Unis ou en Australie, l’intervention humaine d’un avocat reste toutefois d’actualité pour relire et vérifier les résultats générés par l’IA. Le bénéfice reste néanmoins réel car il permet aux professionnels de gagner du temps et de les libérer de tâches souvent chronophages et peu valorisantes pour leur permettre de se concentrer sur des actions à plus forte valeur ajoutée.

En Europe, la Commission Européenne Pour l’Efficacité de la Justice (CEPEJ) a établi une charte déclinant 5 principes éthiques régissant l’utilisation de l’IA dans nos systèmes judiciaires :

  1. Respect des droits fondamentaux
  2. Non-discrimination
  3. Qualité et sécurité.
  4. Transparence, impartialité et équité
  5. « Sous le contrôle de l’utilisateur »

L’enjeu est de fournir un cadre commun pour les parties qu’il s’agisse des procédures ou du systèmes judiciaires.

Octroi une marque et la défendre : les bénéfices d’un recours à l’IA

1. Autoriser une marque

Dans la procédure d’enregistrement d’une marque, les outils d’intelligence artificielle actuellement en vigueur, notamment aux États-Unis, intègrent des techniques de « machine learning » nourries à partir d’informations fournies par un avocat.

Les tâches qu’ils réalisent comprennent la création d’un nom, la recherche d’image, l’analyse des conflits, l’analyse des notifications émises par les offices d’enregistrement, l’identification des marques et ou signes similaires, l’analyse du degré d’agressivité de la concurrence.

En bref, c’est un véritable gain de temps qui permet au professionnel d’améliorer sa prestation de service au client. Certains de ces outils s’adressent directement aux services juridiques et marketing des entreprises.

En constante évolution, les futures IA devraient également inclure l’analyse des risques liés aux dépôt d’une marque, la chances d’en obtenir l’enregistrement, des algorithmes d’image toujours plus précises, l’analyse de parties de mots (identification des parties de mots qui nécessitent l’intervention humaine), et l’analyse de marques constituées de plusieurs mots.

Il reste encore à harmoniser le codage utilisé dans les différentes juridictions pour faciliter l’accès et les recherches dans les différentes bases de données.

2. Défendre sa marque

En cas de contentieux, les outils d’IA intègrent l’analyse automatisée des sites internet pour la protection des marques et de la contrefaçon, l’extraction de données à partir de documents légaux (questions juridiques et noms des parties, surveillance automatisée sur internet des mises en demeure) et la formation du client sur ces fonctionnalités. Une plus grande personnalisation des outils devrait voir le jour prochainement.

Certains outils permettent de mener une recherche de marques de façon antéchronologique, donnant aux professionnels l’accès aux derniers dépôts réalisés au niveau mondial et la possibilité de trier ceux qui sont suffisamment proches de la marque cible afin de les intégrer à leur rapport de surveillance.

Toutefois, pour pouvoir mettre en place cette fonctionnalité, il est indispensable que l’utilisateur ait paramétré l’organisation de son portefeuille de marques au préalable dans l’outil pour toutes les régions concernées.

L’intelligence artificielle permet d’affiner les résultats et de fournir les informations les plus pertinentes dans le cadre de l’application du droit d’une marque lorsque des mots ou des images sont en jeu.

Dans tous les cas, l’intelligence artificielle nécessite encore une intervention humaine pour enrichir ses connaissances, ses données d’entraînement et permettre ainsi d’aller plus vite dans la collecte des informations et les process de tri.

Elle représente toutefois un atout considérable dans la mise à disposition de données relatives aux marques en amont d’un dépôt aussi bien qu’en cas de contentieux. Par contre, l’analyse des risques relève des avocats et de leurs clients. Les questions éthiques et juridiques relatives à l’IA quant à elles, sont dans les mains des professionnels du droit.

3. Droit d’auteur et IA

Comment protéger une innovation créée à l’aide d’une IA ? Dans quelle mesure accorder le droit d’auteur ? La cour de justice américaine vient de revenir sur le droit d’auteur accordé pour les images de la bande dessinée Zarya of the Dawn, créées avec le générateur d’images MidJourney par son auteur Kristina Kashtanova. L’Office du Copyright précise que seuls peuvent être retenus pour le copyright les éléments résultant d’une action humaine, c’est-à-dire les textes et l’assemblage des images par l’auteur. Ce devrait également être la position adoptée par l’UE et les États membres.

Les nouvelles règles européennes sur l’IA

L’IA est un excellent outil d’aide à la création, un réel soutien à l’innovation pour les entreprises quel que soit le secteur d’activité et peut apporter de nombreux bénéfices socio-économiques.

Le parlement européen a donc souhaité élaborer un cadre juridique solide et souple pour une IA digne de confiance.

Les nouvelles règles mises en place :

  • Apportent une définition aussi neutre que possible des systèmes d’IA.
  • Établissent la liste des pratiques d’IA interdites et distinguent 3 niveaux de risques liés à leur utilisation : inacceptable (contraire aux valeurs de l’UE), élevé ou minimal.
  • Contiennent les règles spécifiques applicables aux systèmes d’IA qui présentent un risque élevé pour la santé, la sécurité ou les droits fondamentaux des personnes physiques.
  • Imposent des obligations de transparence à certains systèmes d’IA en raison des risques spécifiques de manipulation qu’ils présentent : systèmes qui interagissent avec les humains, sont utilisés pour détecter des émotions ou déterminer l’association avec des catégories (sociales) sur la base de données biométriques, ou générer ou manipuler des contenus (trucages vidéo ultraréalistes).
  • Créent un cadre juridique propice à l’innovation et encouragent la mise en place des « bacs à sable » réglementaires.

En garantissant le cadre juridique, le parlement européen met en place un système protecteur pour les différents acteurs : entreprises et citoyens.

En France, la CNIL a ouvert un service intelligence artificielle et lance son plan d’action pour préparer l’entrée en application du règlement européen

Les travaux que la CNIL a engagés depuis plusieurs années sur les systèmes d’IA permettront de préparer l’entrée en application du projet de règlement européen IA. Pour y répondre, elle a ouvert tout récemment un service intelligence artificielle pour répondre aux questions spécifiques sur le sujet.

Son plan d’action 2023 s’articule en 4 volets :

  1. Appréhender le fonctionnement des systèmes d’IA et leurs impacts pour les personnes ;
  2. Permettre et encadrer le développement d’IA respectueuses de la vie privée ;
  3. Fédérer et accompagner les acteurs innovants de l’écosystème IA en France et en Europe ;
  4. Auditer et contrôler les systèmes d’IA et protéger les personnes.

En se dotant d’un service dédié, la CNIL renforce son action pour permettre de développer des systèmes d’intelligence artificielle respectueux de la vie privée des individus et des données des organisations.

ALATIS : engagé sur les problématiques de l’IA pour mieux conseiller ses clients dans leur stratégie de propriété intellectuelle

Depuis bientôt 20 ans, Anne Desmousseaux est membre de la commission « nouvelles problématiques » de l’INTA (International Trademark Association) qui traite de questions liées à l’IA et vient de s’emparer de la problématique suivante : « Comment peut-on se servir de ChatGPT dans les procédures de dépôt et d’examen de marque ? ».

La commission teste actuellement ChatGPT dans des procédures auprès des Offices de différents pays. Le test consiste à :

  • Évaluer dans quelle mesure le dépôt d’une marque est possible
  • Répondre à des objections ayant le même fondement (signe descriptif, absence de caractère distinctif, signe déceptif).

L’objectif est d’établir un cadre commun d’utilisation de ChatGPT à partir d’un comparatif objectif des réponses entre pays et de conclure à l’intérêt ou non de se servir de cette IA dans le cadre d’une procédure de dépôt de marque. Les premiers résultats seront rendus fin juin 2023 et permettront de poursuivre le travail par une analyse comparative.

Engagé sur ces sujets, ALATIS en a une connaissance étendue au niveau national et international permettant de vous proposer une stratégie sur-mesure dans vos problématiques de marques ou d’innovations liées à une utilisation de l’IA.

En s’appuyant sur la nouvelle réglementation européenne au plus près des préoccupations des acteurs, ALATIS est l’interlocuteur privilégié des entreprises pour l’ensemble de ces sujets.

Pour toute autre question concernant un dépôt de marque ou plus généralement un droit de Propriété Intellectuelle, nos conseils et avocats sont à votre disposition pour vous renseigner et vous accompagner dans vos démarches.

Vous pouvez nous contacter à l’adresse suivante : contact@alatis.eu

Sources :

INTA : Artificial Intelligence (AI) usage in trademark clearance and enforcement – Emerging issues committee – Artificial intelligence and trademark subcommittee – 21 April 2021

INTA : The use of artificial intelligence (AI) in trademark proceedings – Emerging issues committee – Artificial intelligence and trademarks subcommittee – 21 April 2021

Proposition de règlement du parlement européen et du conseil établissant des règles harmonisées concernant l’intelligence artificielle (législation sur l’intelligence artificielle) et modifiant certains actes législatifs de l’Union

https://www.cnil.fr/fr/intelligence-artificielle-le-plan-daction-de-la-cnil

Résolution du Parlement européen du 20 octobre 2020 sur les droits de propriété intellectuelle pour le développement des technologies liées à l’intelligence artificielle (2020/2015(INI))