Le champagne, en passe de devenir russe ?
Une affaire d’état
C’est un amendement de la loi russe sur la réglementation des boissons alcoolisées signé le 2 juillet par Vladimir Poutine en personne qui a déclenché le scandale. Dorénavant, les champagnes commercialisés en Russie ne pourront plus profiter de l’appellation champagne habituellement écrite en cyrillique sur les bouteilles. Seul la mention champagne écrite en français pourra être conservée. Ce sont les « shampanskoe », eux bien russes qui pourront garder l’appellation tant convoitée, tandis que le produit original sera labélisé comme un vin mousseux, au côté des cavas et autres proseccos.
Cette modification de la législation en vigueur en Russie témoigne pour beaucoup d’une volonté de promotion des vins mousseux de production locale.
La réaction indignée du comité interprofessionnel du vin de champagne ne s’est pas fait attendre, et la plupart des distributeurs de champagne se sont mis en pause et attendent de pouvoir modifier leur production. En effet, la Russie représente 35 millions d’euros d’exportation de vins de champagne par an, et les bouteilles mal labélisées pourraient dorénavant être considérées par les juridictions russes comme de la contrefaçon.
L’AOC et l’AOP, des protections strictement françaises et européennes
L’appellation d’origine contrôlée (AOC) est un label qui selon l’Institut national de l’origine et de la qualité (INAO) garantie un produit dont toutes les étapes de production sont réalisées selon un savoir-faire reconnu dans une même aire géographique, et qui lui donne ses caractéristiques distinctives. Ainsi contrairement au shampanskoe russe, l’appellation champagne répond à de nombreuses règles notamment en terme géographique, de plantation, de viticulture, de vendange, ou de pressurage. Sans le respect de ces tous ces critères, il est impossible pour un vin français d’obtenir l’appellation si chère aux champenois. Il existe donc un système français de protection de la propriété intellectuelle qu’est le champagne. Une convention, signée entre l’INPI et le Comité Champagne qui permet de lutter efficacement contre la contrefaçon en France et tente de protéger les droits des vignerons champenois à l’international.
Au niveau européen, c’est l’appellation d’origine protégée (AOP), un label similaire à l’AOC mais à échelle communautaire, qui protège le champagne sur le territoire communautaire, au même titre que d’autres produits comme le parmesan ou le jambon de parme.
De nombreuses tentatives d’utilisation du nom champagne, aussi bien par des marques prestigieuses comme Dior ou encore par des marques de cigarettes dans des pays étrangers ont été déjouées sur le moyen de la propriété intellectuelle.
La difficile protection de l’appellation à échelle internationale
Depuis les premiers accords de 1891, les vignerons champenois n’ont eu de cesse de protéger leur propriété intellectuelle sur le plus de territoires possibles. Si à l’origine, seulement sept pays permettaient la protection de l’appellation champagne, c’est aujourd’hui 162 états membres de l’OMC qui grâce aux efforts du comité champagne et de l’INAO, permettent la conservation de la propriété intellectuelle champenoise.
Néanmoins, dans des pays comme l’Argentine, la Russie ou encore les États-Unis, l’appellation champagne n’est pas protégée. C’est pour cela que le champagne ne peut plus être appelé ainsi sur le territoire Russe par exemple. Chaque pays suit donc ses propres règles et selon l’endroit, il est parfois même impossible de protéger un nom ou une appellation, aussi célèbre et attachée à un terroir soit elle.
Nos experts peuvent répondre à vos questions relatives au système de protection des appellations, vous pouvez nous contacter à l’adresse mail suivante : contact@alatis.eu
Hugo CHEN, stagiaire, Anne DESMOUSSEAUX, Associée fondateur Alta Alatis Patent
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