Nullité d’une clause de non-concurrence ne visant pas à protéger une clientèle

Pour être valable, une clause de non-concurrence doit être limitée dans le temps et l’espace, proportionnée par rapport à l’objet du contrat et nécessaire à la protection des intérêts légitimes de son bénéficiaire rappelle la Cour de cassation dans son arrêt du 11 mai 2017.

Nullité d’une clause de non-concurrence ne visant pas à protéger une clientèle

Crédits : Snaptitude.

La clause de non concurrence a pour objet de préserver l’entreprise contre une éventuelle concurrence d’un partenaire avec lequel elle est en relation d’affaires ou d’un ancien dirigeant ou associé. Elle consiste à interdire à l’une des parties au contrat, pendant un certain temps et/ou dans un certain secteur géographique, d’exercer une activité professionnelle susceptible de concurrencer l’autre partie.

Bien connue en droit du travail, la clause de non-concurrence est également très utilisée en droit commercial, en particulier dans certains contrats tels que la vente de fonds de commerce, la location-gérance, la franchise, l’agence commerciale, la cession de clientèle ou encore la cession de parts sociales ou d’actions.

La clause de non concurrence doit figurer dans une clause du contrat et être acceptée sans équivoque par le débiteur car elle lui impose de lourdes contraintes. En principe licites, les clauses de non-concurrence ne doivent pas porter une atteinte trop grave à la liberté de faire du commerce : le juge devra constamment faire la balance entre la protection des intérêts de l’entreprise et le principe fondamental de libre exercice d’une activité professionnelle.

La violation d’une clause de non concurrence entraine l’extinction de l’obligation de l’employeur de payer une contrepartie financière au salarié et la cessation de l’activité concurrentielle par le salarié. L’employeur peut également demander des dommages et intérêts aux juges afin de réparer le préjudice subi et agir en responsabilité contre son ancien salarié s’il démontre que ce dernier a commis des actes de concurrence déloyale illicite.

Dans cette affaire, la société La Vie au bord de mer a conclu avec la société Le Grenier Géant un contrat d’agent commercial par lequel cette dernière doit acheter des métaux précieux à des particuliers pour le compte de la première. Le contrat comporte une clause de non concurrence à l’égard du dirigeant de la société Le Grenier Géant : celui-ci a interdiction d’accepter la représentation d’une entreprise concurrente de la société mandante « dans les villes dans lesquelles il s’est déplacé pour des missions au cours de l’exécution du présent contrat ». Après la dissolution de la société mandataire, l’ancien dirigeant constitue une nouvelle société spécialisée dans le domaine du rachat de métaux précieux et en devient salarié. L’ancienne société mandante poursuit le dirigeant en justice pour violation de la clause de non-concurrence et actes de concurrence déloyale.

La Cour d’appel déclare nulle la clause de non-concurrence du contrat d’agent commercial et rejette les demandes de dommage et intérêts de l’ancienne mandante, ce que confirme la Cour de cassation dans son arrêt de rejet. En effet, les conditions de validité de la clause de non-concurrence énoncées depuis quinze ans (Cass. Com. 4 juin 2002 et Cass. Com. 9 juillet 2002) ne sont pas remplies en l’espèce.

  • La limitation de la portée géographique de la clause

La clause de non-concurrence doit déterminer l’espace dans lequel la concurrence est prohibée : un quartier, une ville, un département, une région doivent être précisément délimités.

En l’espèce, la Cour d’appel retient que le périmètre géographique de la clause de non-concurrence n’était ni circonscrit, ni déterminable au moment de la conclusion du contrat, mais au contraire avait vocation à s’étendre sans aucune limite à toute la France au fur et à mesure de l’exécution du contrat.

La condition tenant à la limitation de la portée géographique de la clause n’était donc pas respectée, même si en pratique seule 70 villes sur 36 000 communes françaises avaient été seulement touchées d’après la demanderesse.

  • La proportionnalité à l’objet du contrat

Cette clause n’était pas proportionnée à l’objet du contrat car elle n’avait pas pour but de protéger la clientèle du mandant. En effet, l’objet du contrat consistait à réaliser des transactions ponctuelles et non renouvelables auprès de la population française adulte, ce qui excluait toute fidélisation, notion pourtant essentielle au concept de clientèle. La demanderesse n’avait aucune clientèle à protéger du fait de son activité exercée de manière itinérante et de son absence d’implantation géographique.

  • La protection d’un intérêt légitime de l’entreprise

La clause de non concurrence doit protéger l’entreprise face à la concurrence. Elle permet de sauvegarder les informations, savoir-faire ou clientèle.

Le seul objectif de la clause en l’espèce était d’interdire l’accès au marché national à l’ancien dirigeant, en le privant de la possibilité de continuer à exercer l’activité qu’il avait déjà commencée avant même la conclusion du contrat, ce qui ne caractérise pas la protection d’un intérêt légitime.

Caroline Le Calvez, Étudiante – Master 1 Droit Privé, Université Panthéon-Assas, Paris II.

Anne Desmousseaux, Avocat associée.

Source : legifrance.gouv.fr.

La rémunération supplémentaire des inventeurs salariés
La Roumanie ratifie l’Accord sur la juridiction unifiée des brevets
Unis dans la différence
Sous-traitance et propriété intellectuelle
Un nouveau format pour l’enveloppe Soleau qui devient eSoleau
Volocopter
Soldes OEB Organisation européenne des brevets
0 réponses

Laisser un commentaire

Rejoindre la discussion?
N’hésitez pas à contribuer !

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *